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    FAUT-IL INTERPRETER LA BIBLE ?

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    Souvent j’ai entendu cette remarque : « Je n’ai pas à interpréter ma Bible. Je l’ouvre, je la lis et j’écoute simplement ce que Dieu me dit.» Il y a sans aucun doute une part de vérité dans ce propos.

     

    A. Kuen dit : Nul besoin d’interpréter pour comprendre que Christ est mort pour nos péchés, qu’il a été enseveli, qu’il est ressuscité le troisième jour… Ce que Paul appelle l’enseignement chrétien fondamental (1 Co 15.1, 3-4) Ni pour appliquer  Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, vous aussi, faites-le de même pour eux  (Mt 7.12)  Ni pour savoir que Dieu est amour (1Jn 4.8). Encore qu’ il est important de bien comprendre ce qui se cache réellement derrière les mots que nous entendons. L’étude du vocabulaire biblique est incontournable. Les mots de la Bible n’ont pas toujours le sens que nous leurs donnons. Nous en reparlerons.

     

    Mais au-delà de la limpidité du chemin de salut et des grandes vérités, on trouve dans la Bible de nombreux passages « difficiles à comprendre » selon l’aveu de l’apôtre Pierre lui-même (parlant de Paul) (2 P 3.16). Les Réformateurs (Luther, Calvin, Zwingli…)  nous ont laissés quelques milliers de pages d’explications et de commentaires de l’Ecriture. Ils partageaient sans doute cet avis.

     

    Reconnaissons loyalement que la Bible n’est pas un livre toujours facile ! Comme l’eunuque de la reine d’Ethiopie, nous avons souvent besoin d’un guide (Ac 8.31).  Rappelons que toute traduction, toute lecture, est déjà une interprétation !

     

    L’interprétation de la Bible a pour but de conduire le lecteur à la meilleure compréhension possible de la pensée de l’auteur inspiré. Elle lui indique le sens exact des mots, l’éclaire sur la façon dont les premiers lecteurs percevaient le message, enfin elle doit l’amener à saisir au mieux ce que l’Ecriture veut lui dire, aujourd’hui.

     

    Tout lecteur devient nécessairement un interprète de la Bible.  Quant un pasteur prêche l‘Evangile (la Bible entière), il l’interprète en fait pour le rendre accessible à ses auditeurs d’aujourd’hui. La prédication est une interprétation, un commentaire explicatif. C’est une démarche indispensable, et dans ce sens tout le sermon devient « parole de Dieu » pour ceux qui le reçoivent. (Ou plus exactement, Dieu nous parle à travers ce qui nous est dit)

     

    Le rôle de l’Esprit Saint est de nous ouvrir l’esprit afin que nous comprenions les Ecritures (Lc 24.45). Il le fait magnifiquement. Mais cela n’est pas  une invitation à la passivité… voire à la négligence. Paul félicite son jeune disciple Timothée pour son zèle visant la connaissance des saintes lettres ! (2 Tm 3.14).  Diverses raisons nous invitent à nous donner à ce travail d’interprétation.

     

    La première est sans doute le fait qu’il existe un décalage culturel très important entre le milieu dans lequel se sont exprimés les auteurs de la Bible, et notre époque. Les spécialistes parlent de l’incarnation de la parole de Dieu. On a pas forcément conscience des différences de structures qui existent entre la pensée des auteurs bibliques et la nôtre.  Un tout petit exemple. Il est écrit : « Si tu entres dans la vigne de ton prochain, tu pourras à ton gré manger des raisins et t’en rassasier  (Dt 23.25). Normal à cette époque. Allez donc faire cela aujourd’hui !   Ce genre de situation, et d’autres beaucoup plus sérieuses, abondent dans notre Bible. Il est important de replacer les paroles et les faits dans leur contexte. De nombreux évènements sont enracinés dans leur temps. Ils ne sont pas transposables dans un autre temps. Pour l’avoir oublié, l’Eglise s’est parfois fourvoyée gravement au cours de sa longue histoire.

     

    La langue dans laquelle nous nous exprimons est aussi marquée par notre culture. Les auteurs bibliques utilisent de nombreuses expressions que nous ne connaissons plus. Un exemple. Savez-vous ce que veut dire  amasser des charbons sur la tête de quelqu’un ? (Rm 12.20) Il arrivait que s‘éteigne le foyer domestique, indispensable à la cuisson des aliments. Il était alors d’usage de se rendre chez une voisine complaisante pour lui demander quelques braises ardentes que l’on rapportait dans un petit récipient de terre… porté sur la tête. De la l’expression citée et sa leçon spirituelle : Soyez généreux, même pour vos ennemis… cela sera peut-être pour eux l’occasion d’un retour à l’Evangile ! Dictionnaires bibliques et commentaires sont des instruments précieux… Pour une bonne compréhension de la Bible, la connaissance de l’histoire est un atout précieux.

     

    Seconde raison : l’importance de situer les textes dans le genre littéraire qui leur correspond. On ne lit pas un rapport de gendarmerie ou un compte rendu médical, comme un poème  ou un roman ! Dans un poème, on ne s’étonnera pas de trouver des images, des symboles, des mots qui fleurissent et dépassent leur portée habituelle… l’essentiel est de ne pas tout confondre. Personne n’aurait l’idée d’utiliser les Fables de La Fontaine comme un traité de zoologie. Le Lévitique ne se lit pas comme les Psaumes ou le Cantique des Cantiques ! Les règles d’interprétation diffèrent. Dans la Bible de nombreux genres littéraires se côtoient pour notre bonheur. Le Seigneur a choisi toute la palette de l’expression humaine pour nous parler. Narrations historiques, paraboles, lois, oracles prophétiques, psaumes  poèmes, etc. Ne confondons pas une image poétique ou symbolique avec un fait historique !

    Cela peut engendrer de fâcheuses confusions et de sérieuses incompréhensions.

     

    Troisième raison : Aucun lecteur n’aborde la Bible de façon neutre. Nous portons tous en nous un certain nombre de présupposés conçus à travers certaines lectures, prédications entendues, conversations… Dans son approche de la Bible, chacun est influencé par son éducation, sa mentalité, sa sensibilité … Conscient ou non,  personne n’y échappe.

     

    Au nom de leur interprétation des textes les Cardinaux ont condamné Galilée, les Témoins de Jéhovah nient la divinité du Christ et les mormons se font baptiser pour les morts ! Le sens de certains passages n’est évident que pour ceux qui le croient tel ! Un auteur chrétien écrit : « A lire la Bible avec certaines lunettes, on arrive plus à différencier le message de la Parole de Dieu de notre interprétation » Qu’on y réfléchisse : Ce qui divise les Eglises, ce ne sont que des questions d’interprétation !

     

    Tout cela pourrait laisser perplexe. La lecture de la Bible  ne serait-elle accessible qu’aux seuls « spécialistes » ? Qu’on se rassure : absolument pas. La Bible est ruisselante de la foi de ceux qui l’ont écrite. Chaque lecteur fidèle le sent et le découvre intuitivement, même s’il ne dispose pas des connaissances d’un expert. (Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas se cultiver) L’Esprit Saint  fait mystérieusement et merveilleusement bien son travail ! Il n’est pas nécessaire (heureusement) d’être un mini-savant pour aborder la Bible. Chaque croyant possède par l’Esprit, les ressources qui lui permettent de la lire  avec profit et avec bonheur. Cela d’autant plus que la lecture se fait dans le cadre de l’Eglise, c’est à dire avec d’autres croyants, dans un partage, un échange fructueux, en profitant aussi des connaissances et des conseils des plus « experts » et des ministères d’enseignement donnés par l’Esprit. (Ep 4.11-12)

     

    Le risque de s’égarer dans des interprétations fantaisistes existe, mais reste  limité, si la lecture édifiante est faite dans l’Esprit du Christ. Le filtre est simple : Tout ce qui va dans le sens de la foi et de l’amour, tout ce qui nous aide à mieux servir, à mieux aimer est dans la lumière de Dieu… Toute interprétation qui ne nous conduirait pas dans ce sens, serait suspecte.  Ayez de l’amour les uns pour les autres, c’est à cela qu’on vous connaîtra comme mes disciples  Voilà le vrai signe du chrétien. On ne reconnaît pas un chrétien à sa science biblique, mais seulement à sa certitude d’être sauvé par le sang de Christ, et à l’amour qu’il rayonne chaque jour.